Les Terres Enchantées

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    Les Oracles

    Seb
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    Message  Seb Mar 9 Nov - 22:57

    Oracles : il s’agit de la branche occulte et divinatoire de la magie. Elle permet de lire l’avenir (vaudou??). Ceci est davantage une magie de ''concentration'', et de type spirituel qu'une magie physique.
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    Message  Guig Mer 17 Nov - 17:33

    pour ceux ci javais a quelque choses de si milaire au guerriseur sauf que eux irais au temple celeste et cest la que il ressemverais leur enseignment il faudrais alors a ce moment la cree un autre forum encore une fois basique pour les oracles les oracle viser aurais un code speciale et nous pourrions alelr voir si ce sont bien les personne dit sur le forum car nous pourrions reperesenter le grand conseil des oracle des tripulture dimentionne ( cest un nom que je vien de pensert qui serais beau et aproprier pour ce genre de type de choses quen penser vous ?
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    Message  Guig Mer 17 Nov - 21:00


    L'ORACLE DE DELPHES








    DELPHES (Oracle de), Myth. Hist. Littér. le plus fameux de tous les oracles du paganisme, et qui devint, pour ainsi dire, l'oracle de toute la terre ; il précéda le règne de Cadmus, et était même établi avant le déluge de Deucalion.

    Diodore de Sicile, Strabon, Pausanias, et Plutarque, racontent que des chèvres qui paissaient dans les vallées du mont Parnasse, s'étant avancées vers une espèce d'antre peu connu, firent des bonds étonnants, et poussèrent des cris extraordinaires. Bientôt les pâtres, les villageois, et tous les habitants du lieu, furent à leur tour saisis des mêmes mouvements, et se persuadèrent que quelque dieu était venu se cacher dans le fond de l'abyme, afin d'y rendre ses oracles. On attribua d'abord l'oracle à Neptune et à la Terre ; de la Terre, l'oracle passa à Thémis sa fille : ensuite elle s'en démit en faveur d'Apollon, qu'elle chérissait particulièrement. Enfin celui-ci par ses lumières dans la science de deviner, à laquelle il s'appliqua dès sa plus tendre jeunesse, demeura maître de l'oracle, et l'éleva au plus haut point de célébrité. Le singulier de ce détail fabuleux, est qu'on le puise dans les Historiens comme dans les Poètes.

    Apollon fut donc le dernier possesseur de l'oracle de Delphes, et s'y maintint avec plus ou moins de gloire, suivant les conjonctures, le degré de superstition des peuples ou de l'industrie des prêtres, jusqu'au temps que les Thraces pillèrent son dernier temple, et le brûlèrent vers l'an 670 de la fondation de Rome. Pendant ce long espace de siècles, le temple d'Apollon regorgea de présents qu'on y envoyait de toutes les parties du monde. Les rois, les potentats, les républiques, et les particuliers, n'entreprenaient rien qu'ils ne l'eussent consulté ; tout ce qu'il y avait d'habitants à Delphes travaillaient à l'envi à lui procurer des consultations, et à lui attirer les étrangers, afin de leur vendre les oracles au prix des plus somptueux sacrifices et des plus magnifiques offrandes ; tous étaient occupés ou de l'entretien du temple, ou des sacrifices, ou des cérémonies qui concernaient les oracles ; tous briguaient avec zélé l'honneur d'être les ministres d'un dieu qui les comblait chaque jour de nouveaux bienfaits. Voyez l'article précédent.

    Parmi ces ministres se distinguaient ceux qu'on nommait les prophètes. Ils avaient sous eux des poètes, qui mettaient les oracles en vers ; car il n'y a eu que de courts intervalles de temps où on les rendit en prose. L'antre d'où sortaient les oracles, était situé vers le milieu du mont Parnasse, du côté qui regardait le midi : c'étaient les prophètes qui recevaient les paroles de la Pythie ; elle montait sur le trépied sacré pour rendre les oracles du dieu, quand il voulait bien se communiquer aux hommes : mais les oracles qu'elle prononçait n'étaient point faits pour le plaisir des oreilles, ni pour porter dans l'âme cette tendresse qu'excitaient les poésies de Sapho. La voix de la Pythie, dit Plutarque, atteignait jusqu'au-delà de dix siècles, à cause du dieu qui la faisait parler. Voyez PYTHIE.

    C'est à l'oracle d'Apollon que la ville de Delphes dut sa naissance et son agrandissement ; elle lui dut sa réputation, et ce grand éclat qui la fit regarder comme le centre de la religion, comme le séjour favori des dieux. Quoique cette ville n'eut que des précipices et des rochers pour pourvoir à ses besoins, l'oracle d'Apollon lui tenait lieu des plus riches coteaux et des plaines les plus fertiles : mais ce dieu n'était pas toujours en humeur de le rendre ; d'ailleurs il était très friand de sacrifices, et très difficile à cet égard. Si l'on entrait dans le sanctuaire de son temple sans avoir sacrifié, le dieu était sourd, la Pythie était muette. Voyez sur cette matière, Plutarque ; les mém. de l'acad. des Inscript. Van-Dale, de oraculis Ethnicorum, et l'histoire des oracles de M. de Fontenelle. J'ai parcouru tous ces ouvrages la plume à la main ; et le faisant dans les mêmes vues que Montagne, je pratique sa méthode : "Ce que je lis je m'en dégorge, non sans dessein de publique instruction, je prête attentivement l'oreille aux livres de ce genre, en guettant si j'en puis friponner beaucoup de choses pour émailler ou étayer celui-ci".

    Article de M. le Chev. DE JAUCOURT.


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    Message  Guig Mer 17 Nov - 21:04

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    Message  Guig Mer 17 Nov - 21:05

    La divination
    L'Oracle de Delphes

    L'histoire de l'oracle de Delphes est une partie essentielle de l'histoire grecque, et on ne saurait exagérer la place que tint cet institut mantique. C'est lui qui maintint l'unité hellénique au VIIe et au VIe siècle, et, dans cette période, Delphes peut être justement qualifiée de capitale de la Grèce, capitale religieuse et presque capitale politique. Il y a peu de corporations sacerdotales qui puissent revendiquer un si beau et si vaste rôle.
    Nul lieu n'était plus propre à frapper l'imagination que le site de Delphes.

    « L'air qu'on respire là est lourd, chargé d'une vapeur tiède, quand le soleil y darde ses rayons réverbérés par les flancs nus des rochers, et d'une fraîcheur humide aussitôt que l'ombre envahit ce recoin perdu. Les moindres bruits y sont répercutés et, grossis par l'écho sonore des Phaedriades. Cet ensemble de Sensations fortes faisait descendre dans l'âme naïve d'un Pélasge ou d'un Hellène des premiers siècles une sorte de recueillement involontaire et de secrète terreur, soit que son pied fit rouler au fond des ravins les pierres dont le sol est jonché, ou que, levant les yeux vers les cimes consacrées, comme tous les hauts lieux, à la présence invisible de la divinité, il vit tournoyer dans l'air les oiseaux de proie, ou encore que, sacrifiant aux puissances divines, il regardàt la fumée de l'autel balancer en montant ses spirales capricieuses, il attribuait à tous ces incidents une solennité particulière et comme une intention surnaturelle. Enfin, il s'endormait au murmure des ruisseaux bondissauts; ses sens ébranlés transformaient en songes prophétiques les impressions qu'ils devaient aux objets d'alentour. » (Bouché-Leclercq, t. III, p. 43).
    Les légendes étaient nombreuses; on parlait d'anciens cultes de la Terre, de la Nuit, de Thémis, de leurs prophéties, de celles d'un serviteur et de deux fils de Poseidon. Dans le vallon, on croyait surprendre le vol des Thries, trois nymphes à la tête poudrée qui symbolisent les trois sources (Castalie, Cassotis et Delphousa) et qu'on compare à des abeilles.
    La divination était localisée auprès d'une crevasse (Chasma gês) que l'on regardait comme la bouche de la Terre, de Gê, la première qui y ait dispensé les révélations. Lorsque les Olympiens succédèrent aux dieux de la nature, Poseidon avait, dit-on, occupé Delphes, qu'il dut ultérieurement céder à Apollon. Ce récit doit répondre à une succession chronologique réelle. L'oracle primitif placé sous l'invocation de Gê devait ressembler à celui de Dodone une source fatidique, un arbre qui font entendre les voix
    divines, un trou par où viennent les songes. L'arbre était un laurier penché sur l'antre qui fut personnifié en Daphné, nymphe fille de Gê, qui passait pour avoir été son interprète, puis la maîtresse d'Apollon. Mais le principal gardien de l'oracle chtonien avait été le serpent ou dragon Python terrassé par Apollon. Il est difficile de savoir si ces deux légendes sont locales ou si elles ont été apportées par la religion apollinienne. Pour en revenir à l'histoire, on peut admettre que le culte pré-hellénique de Gê était lié à celui de Zeus dont le centre se trouvait sur le Parnasse à Lykoreia, où se trouvait la première ville qui plus tard se transporta dans le vallon. Les gens de Lykoreia avaient conservé la privilège de fournir à l'oracle un collège de saints (osioi) qui joue un rôle effacé, mais perpétue évidemment l'ancien sacerdoce analogue à celui des Selles de Dodone. A une époque également très reculée vinrent des Thraces, serviteurs des Muses et de Dionysos dont les chefs mythiques étaient Philammon et Thamyris. Dans cette région du Parnasse, Dionysos est presque un dieu indigène. Son tombeau est à Delphes à côté de la crevasse fatidique et de cette pierre blanche qu'on appelle le nombril de la Terre. Du dehors vinrent les cultes de Poseidon et d'Apollon, lesquels furent apportés par mer d'après la tradition la plus répandue. L'influence crétoise nous est signalée. On montrait à Delphes un bétyle qui était la pierre que Rhéa ou Gê avait fait avaler à Cronos au lieu de son fils. Le culte de Poseidon Delphinios permet de le regarder comme l'éponyme de Delphes connue seulement sous le nom de Pytho dans les poèmes homériques; il fut importé par mer. On dit que Delphos était fils de Poseidon et de la nymphe Melaena. La divination empyromantique paraît avoir été la méthode des prêtres de ce dieu. Bientôt d'ailleurs le culte d'Apollon vint réduire à peu de chose la religion posidonienne. II fut apporté par les Crétois, renforcé par les Doriens qui lui donnèrent sa forme définitive.

    La légende des origines du culte apollinien de Delphes a été racontée dans l'hymne homérique à Apollon Pythien qui décrit la victoire du dieu sur le dragon Typhon, y rattache l'étymologie du nom de Pytho et dit comment le dieu fonde son oracle et prend pour le desservir des Crétois. On s'arrangea aussi pour rattacher les cultes et les mythes de Delphes et Délos.

    L'oracle une fois au pouvoir d'Apollon, il nous faut maintenant étudier les sacerdoces qui y étaient établis et les méthodes qu'ils appliquaient. Le passé ne fut pas aboli. Les « saints » qui prétendaient descendre de Deucalion restent honorés; la crevasse sacrée demeure le lieu privilégié; ce ne fut pas sans lutte que furent mises de côté les méthodes pré-helléniques, observaton des voix de la Terre et l'oniromancie. Enfin il est bien soutenable que des prétresses de Gê aux pythies il n'y eut pas solution de continuité et que le dieu nouveau venu se borna à plier à ses volontés les prêtresses de Delphes. La fameuse pierre qui symbolisait le Zeus archaïque, l'omphalos, ne perdit rien des hommages que lui rendait la crédulité populaire. On discerne le souvenir de rites clédonomantiques et oniromantiques. En somme, avant l'organisation du sacerdoce apollinien, la divination delphique usait de l'interprétation des songes et des voix, de l'observation des oiseaux et de la flamme des autels. L'oniromancie dut être éliminée rapidement comme contradictoire avec la nature même du culte apollinien. Euripide a parlé de ce conflit (Iphig. Taur., v. 1259-1281) et c'est une tradition arrangée tardivement qui suppose une transition dans laquelle Thémès aurait enseigné la mantique à Apollon. Celui-ci conserva l'ornithomancie, la clédonomancie et les présages tirés des sacrifices. Mais il transforma totalement l'oracle en y introduisant la divination enthousiaste.

    La surexcitation nerveuse produite par le sentiment religieux des crises d'hystérie qui saisissaient les servantes du dieu ont eu de tout temps un grand empire sur l'imagination populaire vivement frappée par ces manifestations violentes où le corps humain semble possédé par un autre esprit. Nous avons étudié ailleurs (Dionysos) l'origine de ces phénomènes ou plutôt de leur application au culte des Nymphes et de Dionysos. Ces cultes dominaient dans la Thrace mythique des anciens aèdes à laquelle se rattachait le Parnasse. Leur combinaison avec ceux de la Phrygie où l'orgie sacrée tenait une grande place accrut leur force d'expansion, et Dionysos devint héritier des anciens dieux chtoniens évincés par les Olympiens. Elle mettait en danger le sacerdoce apollinien de Delphes qui s'était emparé de l'oracle de Gê. Une transaction intervint qui allia Apollon et Dionysos dont les deux cultes furent unis dans le sanctuaire et assura le succès de l'institut mantique. Apollon révélait tout ce qui se passait à la lumière du jour, sur terre et dans le ciel; Dionysos, ce qui se passait sous terre. Il prêta à son frère la manie prophétique de ses adoratrices et lui fournit la pythie. Cette combinaison dut se produire vers la fin du VIIIe siècle. C'est donc à cette date que fut organisée la divination apollinienne.

    Elle était intuitive ainsi qu'il a été dit. Le symbole extérieur fourni par le dieu est le trépied de bronze posé au-dessus de l'antre sacré où l'on avait dérivé les eaux de la source Cassotis. Ce trépied avait été, disait-on, donné par Jason, enfoui par les Hylléens, ravi par Héraclès ou Coraebus, rapporté et adjugé par Apollon au plus sage; après avoir été donné tour à tour aux sept Sages, il fut rendu au dieu. Sa forme exacte est inconnue. Sur ce trépied montait la pythie, instrument passif de la révélation divine; c'était une vierge qu'on choisissait belle; dans la décadence, le Thessalien Echécrate en avant enlevé une, on prit pendant quelque temps de vieilles femmes, puis on revint à la tradition. Quand s'accrut la vogue de l'oracle, on eut deux pythies, plus une suppléante, la fatigue des consultations dépassant les forces d'une seule. Au temps de Plutarque, une seule suffisait de nouveau. Les pythies se sont que des agents inférieurs quoique indispensables. Les maîtres sont les prêtres d'Apollon, la corporation recrutée dans l'aristocratie de la cité. On ignore tout de leur existence, tant ils se sont effacés derrière le dieu. La pythie dans ses extases a toujours à ses côtés un ou plusieurs prophètes qui notent ses paroles, ses cris, et en font un oracle rédigé communément en vers hexamètres, d'une obscurité calculée. Cet oracle, rédigé par les prêtres, était ensuite porté par le consultant aux devins exégètes, qui le lui traduisaient. Nous sommes assez bien renseignés sur le mode des consultations.

    A l'origine elles étaient rares, peut-être seulement annuelles. Apollon n'était pas toujours présent ni disposé à parler. Aux jours néfastes rien ne pouvait l'y décider; il est probable aussi que, dans les trois mois d'hiver consacrés à Dionysos, l'oracle ne fonctionnait pas. Même les consultations ordinaires ne furent jamais très fréquentes. On les limita à une par mois, le septième jour, la plus solennelle étant celle du mois Bysios. Ce jour-là avait lieu une consultation générale devant le temple; la pythie s'asseyait sur les marches, devant la foule, et prophétisait gratuitement ou à prix réduit; chacun tirait de cette réponse collective ce qui le concernait. Le reste du mois on donnait des consultations plus chères dans le sanctuaire, la pythie montant sur le trépied. Les consultations extraordinaires étaient donc de beaucoup les plus nombreuses. On tirait au sort l'ordre dans lequel les clients seraient introduits; quelques-uns avaient reçu de la corporation le privilège de passer les premiers. Tous étaient soumis au préalable à une épreuve afin de savoir si Apollon les agréait. On faisait un sacrifice; il fallait que la victime (une chèvre d'habitude) tremblât lorsqu'on versait les libations sur elle; quand c'était un taureau on lui offrait de la farine; un sanglier, des pois chiches qu'il fallait qu'il accepta. La pythie se purifiait par des ablutions dans l'eau de la source de Castalie, par des fumigations en brûlant du laurier et de la farine d'orge; elle entrait dans le sanctuaire vêtue d'un costume qui imitait celui d'Apollon Musagète, buvait de l'eau de la source Cassotis, mettait une feuille de laurier dans sa bouche, prenait à la main une branche de laurier et montait sur le trépied. Le consultant, qui avait attendu dans une chambre voisine, était introduit et posait sa question, soit par écrit, soit oralement. La pythie, enivrée par les vapeurs (acide carbonique) qui émanaient de l'antre, tombait en extase. Ces crises nerveuses étaient si violentes que parfois elle y succombait. Le prophète assistant la pythie recueillait l'oracle, le rédigeait et en remettait copie au consultant; si celui-ci n'était qu'un délégué on lui remettait une réponse scellée. Les oracles étaient conservés par les prêtres dans les archives sacrées du temple. Ceux que l'on avait remis aux ambassadeurs des Etats grecs étaient déposés dans les archives publiques.

    La puissance de l'oracle fut due pour beaucoup au concours des Doriens. Cette population énergique et croyante se mit à son service. Elle lui créa un pouvoir temporel en lui asservissant les Dryopes qui furent établis près de Cirrha comme serfs ou tributaires d'Apollon. L'oracle présida à l'alliance des Héraclides et des Doriens auxquels il promit le Péloponnèse. Il organisa la ligue amphictionique qui aurait pu devenir une nation et qui fut du moins une ligue religieuse protectrice de Delphes.

    L'oracle fut ainsi placé sous la sauvegarde de la majorité des Hellènes. Son rôle politique commence avec la conquête du Péloponnèse par les Doriens. Plusieurs légendes mettent en scène des ennemis du dieu : le roi d'Argos, Danaüs; les Phlégyens d'Orchomène; Néoptolème, le fils d'Achille. Une entente s'établit avec le culte d'Héraclès, autre divinité des Doriens; on contait que le héros, ayant ravi le trépied delphique, avait été poursuivi par Apollon, et qu'après une lutte acharnée il s'était soumis. Les cultes divinatoires de Pan et d'Hermès furent subordonnés de même; les autres formes de la religion apollinienne furent absorbées. On supprima la mantique d'Apollon Karnos. La tentative faite à Argos pour organiser un oracle d'Apollon Pythien échoua; elle eût produit un schisme dangereux. L'obéissance à l'oracle de Delphes se maintint complète à Sparte dont la constitution, attribuée au fabuleux Lycurge, avait reçu la consécration de la pythie. Les Messéniens dévots de Délos et conseillés par les lamides d'Olympie, furent poursuivis par la haine de la corporation delphique Mais les Spartiates ne purent achever la conquête de la péninsule et se firent admettre dans la fédération d'Olympie. Les rois héraclides furent presque annihilés par les éphores dévots de l'oracle de Thalamae. Les prêtres d'Apollon se rapprochèrent alors des Ioniens qui prévalaient à Athènes et à Sicyone. Menacés par les gens de Crisa qui prélevaient des taxes arbitraires sur les pèlerins qui venaient à Delphes, ils firent appel aux Amphictyons et commencèrent une guerre sacrée. Elle dura dix ans (600-590 av. J.-C). La coopération des Athéniens guidés par Solon et Alcméon, du tyran de Sicyone, Clisthène, et des Scopades de Thessalie décida la ruina de Crisa et l'extermination des adversaires du dieu dont les champs furent consacrés à Apollon. L'Etat sacerdotal agrandi devenait autonome. Par la réorganisation des jeux Pythiques, il fit concurrence à Olympie. En 548, le temple, bâti par Trophonius et Agamède, brûla. Une souscription faite dans toutes les cités helléniques, et à laquelle contribua la roi d'Egypte Amasis, fournit les fonds nécessaires pour la reconstruction. L'architecte corinthien Spintharus dressa les plans; les Alcméonides d'Athènes se chargèrent de l'entreprise à forfait, moyennant un versement de 3000 talents. Ils dépassèrent leurs engagements, substituant le marbre de Paros à la pierre pour la façade. Cette date marque l'apogée de l'oracle de Delphes. Le moment est donc venu d'étudier son rôle et son influence.

    On s'est étonné dans les temps modernes que des institutions fondées sur des croyances aussi illusoires et si peu confirmées par l'expérience aient joui d'un tel crédit; c'est méconnaître singulièrement la nature de la foi religieuse, et il serait bien curieux de comparer les titres de n'importe laquelle des religions modernes à la crédulité de ses adeptes avec ceux qu'invoquaient les prêtres d'Apollon.

    « II ne faut pas croire que la non-réalisation des prophéties put entamer à bref délai le crédit de l'oracIe. On voit tous les jours que rien n'est accommodant comme la crédulité humaine. Les croyants parvenaient presque toujours à se démontrer à eux-mêmes que la parole d'Apollon s'était accomplie, mais tout autrement qu'ils ne s'y étaient attendu. L'histoire de la divination est remplie de ces surprises qui faisaient admirer les ressources ingénieuses de Loxios et permettaient de concilier, dans la mesure du possible, la liberté humaine avec la liberté et la dignité des dieux. C'eut été mettre la fierté divine d'Apollon à une singulière épreuve que d'exiger de lui, à chaque question, une réponse catégorique; c'eût été, du même coup, écraser la liberté humaine sous une certitude impérative et l'obliger à choisir entre une révolte impie autant qu'inutile et une soumission aveugle à la fatalité. Personne ne reprochait au dieu de ne pas livrer aux mortels tout le secret des destins. Les oracles rencontraient en Grèce une disposition d'esprit très favorable, l'idée que ces immortels ne disposent pas comme ils le veulent de l'avenir et qu'ils n'ont pas le droit de bouleverser l'enchaînement nécessaire des causes : le sacerdoce pythique encourageait cette doctrine, sachant bien qu'Apollon regagnait en réputation de bon vouloir ce que la révélation perdait d'effet utile. Si quelqu'un se plaignait d'avoir été ou mal averti ou égaré par les conseils de l'oracle, on lui rappelait que nul ne peut ne ne doit entraver la marche des destins, et qu'il était insensé d'attendre d'Apollon les moyens d'éviter l'inévitable. Apollon s'était même réservé le droit de mentir ou de donner des conseils pernicieux, s'il le jugeait à propos. C'était là le châtiment qu'il réservait aux indiscrets, aux mal intentionnés ou tous ceux qui approchaient de son temple avec des arrière-pensées coupables. » (Bouché-Leclercq).
    Il est peu raisonnable de dire que les oracles aient été fondés sur le charlatanisme et la fourberie des prêtres; c'est méconnaître la crédulité de ceux-ci qui étaient les premiers à se convaincre de ce qu'ils répétaient; les procédés qu'ils employaient pour provoquer les névroses de leurs pythies leur avaient été transmis par la tradition liturgique, c.-à-d. enseignés par le dieu lui-même. En fait, ces accommodements ne peuvent être nettement écartés que par la science, par l'idée des lois physiques, que découvrirent et propagèrent les savants philosophes de l'lonie; mais cette conception est la négation de toute la religion avec laquelle elle est incompatible
    Les progrès du rationalisme furent funestes à la divination et à son plus puissant organe, l'oracle de Delphes; dès qu'on discuta la révélation, la foi fut ébranlée. Elle souffrit aussi des oppositions que suscitèrent les prêtres d'Apollon en intervenant dans les affaires publiques; on découvrit des abus ; quelques exemples de vénalité excitèrent une défiance générale. Mais ces causes de décadence n'agirent que lentement; au début du VIe siècle av. J.-C., l'oracle est encore universellement respecté et écouté. Le dévouement des Doriens, l'extension de l'amphictyonie lui ont assuré la clientèle de presque toute la Grèce continentale; il reçut aussi les hommages des rois barbares qui fortifièrent son crédit. Il devint l'institution nationale par excellence. L'hégémonie de Delphes fut d'autant plus aisément acceptée par les Grecs jaloux de leur liberté quils ne pouvait que persuader, non commander: Il fallait beaucoup d'habileté diplomatique pour se concilier des Etats aux traditions et aux intérêts très variés. Les législateurs accrédités par l'oracle, Thalétas, Terpandre à Sparte, Epimenide à Athènes, interviennent en des jours de crise; leur venue a été sollicitée. C'est le propre de ces pouvoirs spirituels que la moindre résistancé puisse les tenir en échec, tandis qu'à d'autres moments ils peuvent susciter des efforts formidables, renverser des dynasties, provoquer des révolutions, détruire des Etats.

    L'oracle de Delphes eut une politique inspirés de prin cipes permanents, une politique-aristocratique et conservatrice il se montra hostile aux tyrans, aux démocraties. Le bras séculier des Spartiates fut mis souvent à son service et donna une sanction efficace aux malédictions d'Apollon; les tyrans de Corinthe, de Sicyone, de Naxos, d'Athènes, furent ainsi expulsés. L'hostilité de Delphes envers Sybaris contribua à l'anéantissement de cette riche cité. Les Athéniens firent de grands sacrifices pour se concilier et conserver la faveur de l'oracle. Les complaisances de celui-ci pour le tyran Périandre de Corinthe, pour Clisthène de Sicyone, ne lui furent pas immédiatement nuisibles. La manifestation la plus remarquable de son activité poli tique est la direction de la colonisation. On sait que le mouvement de colonisation qui du VIIIe au VIe siècle hellénisa les rivages de la Méditerranée orientale fut un des faits dominants de l'histoire grecque. L'influence apollinienne y présida; la plupart des colonies furent fondées avec la coopération du sacerdoce pythien et grandirent sous sa surveillance. Les préjugés religieux furent en cela d'accord avec les intérêts matériels. La fondation d'une colonie, cité nouvelle, était un acte religieux pour lequel le concours des dieux était indispensable. Apollon conducteur était un guide tout désigné. La colonisation est postérieure à l'invasion dorienne et à l'organisation définitive de Delphes. On vint donc lui demander protection et conseil, plutôt qu'aux devins libres moins qualifiés que cette puissante corporation. Par ses relations étendues elle était au courant de tout ce qui arrivait dans les régions helléniques et sur leurs confins. Elle centralisait les récits des commerçants, des voyageurs, dressait des cartes, des collections d'histoire naturelle. La précision des renseignements qu'elle était à même de donner aux émigrants frappait ceux-ci d'admiration. La colonisation de Cyrène, la fondation de Métaponte, de Crotone, de Rheghium furent l'oeuvre directe du clergé delphique; toutes les colonies chalcidiennes ont étés établies sous son patronage. Il a dépassé l'influence des clergés apolliniens d'Ionie qui eurent un rôle analogue. Favorisant l'expansion dees Hellènes, il empêchait de gaspiller les efforts, de les trop éparpiller; il tirait grand avantage des services rendus en ces circonstances. Il garde un semblant de suzeraineté sur les colonies à la fondation desquelles il a contribué. Beaucoup lui payent tribut, au moins dans leurs débuts. Elles expédient au dieu la dîme des produits de leur sol, l'été d'or. Quelques-unes continuèrent régulièrement : telles Myrina, Métaponte, ApolIonie.

    « Chaque colonie florissante était pour l'oracle une fille reconnaissante, un monument de sa sagesse vigilante et prévoyante. »
    Les colonies isolées d'abord en terre étrangère maintiennent soigneusement les rapports avec l'Hellade et le clergé apollinien.
    « Le dieu de Delphes put donc, du poste central qu'il occupait, porter ses regards vers le monde hellénique, encourager et diriger l'esprit entreprenant de la nation, montrer, aux explorateurs leur but en leur traçant un itinéraire sur une mer sans chemins, donner aux émigrants les moyens de s'établir, en même temps que de salutaires instructions, et maintenir la solidarité des fondations nouvelles, soit entre elles, soit avec les anciennes villes. Apollon est chez les Grecs, comme Melkart chez les Phéniciens, le souverain des colonies : il est le fondateur du droit colonial et, en même temps, l'arbitre suprême de tous les conflits juridiques qui s'élèvent entre la métropole et ses colonies. » (E. Curtius).
    La tutelle exercée par le clergé de Delphes sur les colonies fut surtout politique et morale. Il eut part à la rédaction de leurs constitutions par le choix des législateurs. C'est lui qui désigna le Mantinéen Demonax aux Cyréniens, Zaleucus aux Locriens, qui inspira Charondas à Catane, Androdamas de Rhegium à Chalcis (de Thrace) les villes chalcidiennes d'Italie (Rhegium Callipolis), de Sicile (Naxos, Zancle, Leontium, Catane), celles de la Chalcidique adoptent les législations inspirées par Apollon dont le caractère était autoritaire et socialiste, subordonnant les volontés et libertés individuelles à l'harmonie de l'ensemble et du bien idéal de la cité.
    Dans le domine du droit religieux le clergé de Delphes est très écouté; Platon l'affirme avec quelque exagération :

    « C'est à Apollon Delphien que nous laissons le soin de faire les lois les plus grandes, les plus belles et les plus importantes, c.-à-d. celles qui concernent la manière de construire les temples, les sacrifices, le culte des dieux, des génies, des héros, les funérailles et les cérémonies qui servent à apaiser les mânes des morts [...] car le dieu de Delphes est en matière de religion l'interprète naturel du pays, ayant exprès choisi le milieu et comme le nombril de la terre pour y rendre ses oracles. »
    Il fallait, bien entendu, respecter les coutumes locales très divergentes, et l'oracle conseilla toujours de « suivre les usages de son pays »; il n'avait nul désir de provoquer des querelles religieuses. Il n'essaya pas de se faire attribuer une juridiction disciplinaire sur les prêtres des cultes spéciaux; il jugea les cas qui lui furent soumis, rien de plus. Il fit pourtant des efforts persistants pour l'adoption d'un calendrier uniforme dans toutes les cités grecques. Le calendrier était surtout une liste de fêtes publiques assignant à chaque dieu son mois, ses jours consacrés. Il était fâcheux de voir des fêtes destinées à commémorer certains phénomènes de la vie naturelle se déplacer dans l'année de saison en saison à cause d'erreurs dans les supputations astronomiques ; il ne l'était pas moins que les anniversaires du même fait légendaire fussent célébrés à des dates différentes dans des pays voisins. Les jeux nationaux suivent une certaine régularité dans la chronologie. L'oracle tenta de faire accepter son cycle de huit années de quatre-vingt-dix-neuf mois qui commençait par la procession à Tempé. Le calendrier apollinien fut accepté par les Doriens du Péloponnèse, et les Athéniens y conformèrent à peu près le leur.
    L'oracle de Delphes eut une influence remarquable sur l'institution de nouveaux cultes. Il ne lutta pas contre l'importation des rites et des divinités exotiques, le polythéisme étant, de sa nature, tolérant. Il essaya de galvaniser la foi nationale en développant le culte des héros, qu'il était d'ailleurs plus aisé de grouper autour de la religion apollinienne. Ce culte, qui flattait le patriotisme local prêtait une nouvelle force à la religion traditionnelle. Parmi le grand nombre des fondations de chapelles, de sacrifices, de translations de reliques ordonnées par l'oracle, nous rappellerons les recherches des os d'Hector par les Thébains, d'Oreste par les Spartiates, d'Actéon parles Orchoméniens, le culte de Damia et Auxesia restauré à Epidanre, celui des Erynies, de Laïus et d'Oedipe à Sparte, des sept héros platéens (avant la bataille de Platées), enfin celui des dix héros indigènes donnés comme patrons aux dix tribus de la nouvelle constitution athénienne. L'oracle entreprit une oeuvre plus contestable lorsqu'il se mêla de faire des héros en décernant l'apothéose à des athlètes. Il les multiplia imprudemment, cédant à l'engouement des Grecs pour ces vainqueurs. Il aurait pu se contenter des certificats de sagesse qu'il octroyait aux hommes de bien. Mais ceci nous conduit à l'examen de la morale delphique.

    La religion apollinienne a donné aux Hellènes leur plus haute loi morale. Elle affirma par la bouche du sacerdoce delphique que les pratiques extérieures du culte n'ont pas de valeur par elles-mêmes, qu'il faut, avant-tout, avoir un coeur pieux. Le dieu exigeait, pour le favoriser de ses conseils, que le consultant fût pur de corps et d'âme. C'est la pythie qui, à propos des purifications, a proféré cette célèbre maxime :

    « Pour l'homme de bien, une goutte suffit, mais pour le méchant, l'océan tout entier avec ses flots ne le laverait pas. »
    Celui qui se présente avec de mauvaises pensées ne peut compter sur la bienveillance divine; s'il essaye de tromper Apollon pour préparer un crime, il risque d'être comme le Spartiate Glaucus, exterminé avec toute sa famille. L'oracle, avant accepté les rites purificatoires de l'Orient, fut obligé de se faire une opinion sur la question des souillures et dés péchés. Il n'adopta pas de solution tranchée. Lier la responsabilité à l'acte, c'était ne tenir aucun compte des progrès de la philosophie et de la morale; la lier à l'intuition, c'était ruiner la morale pratique et tout contrôle extérieur à la conscience individuelle; c'était aussi diminuer la valeur des expiations demandées par les dieux et surtout rendre inutile l'appel à une révélation pour découvrir la cause secrète des malheurs privés ou publics.
    L'oracle ne se fit pas de théorie : il patronna les purifications opérées selon les rites religieux et, d'autre part, il adopta des légendes qui lui attribuaient une moralité plus élevée; Oreste, Alcméon, meurtriers de leur mère, sont frappés de folie et ne trouvent le repos qu'à Delphes. Il fallait d'abord expier l'acte coupable, et Apollon enseignait le respect de la vie humaine, lui-même ayant versé le sang avait subi une pénitence de huit années; les meurtres d'Esope, d'Archiloque, des ambassadeurs perses (à Sparte) durent être expiés de la même manière. Mais l'oracle exigeait un examen de conscience sans aller toutefois jusqu'à donner l'assurance du pardon à ceux qui se repentaient. La morale delphique était très modérée, ne recommandant nul excès, indulgente aux courtisanes et aux amoureux des deux sexes.

    Les maximes de la sagesse apollinienne, les « commundements » de Delphes, nous sont en partie inconnues. On les mettait volontiers sous le nom des sages inspirés par le dieu; mais celui-ci en endossait la responsabilité, puisqu'on les avait fait graver sur les murs ou les colonnes du temple. On ne sait si elles étaient en vers ou en prose, s'il y en avait cinq, six ou davantage. La plus mystérieuse est le fameux E; on le traduit EG, «Tu es », affirmation de foi du fidèle ou affirmation de responsabilité du dieu au fidèle. Les autres sont : « Rien de trop », « Au dieu l'honneur » et « Connais-toi toi-même ». Ces préceptes moraux sont intéressants, mais évidemment insuffisants. La puissance morale de Delphes tenait à d'autres causes, et elle était garantie par sa puissance matérielle.

    Les fêtes périodiques donnaient lieu à de grandes transactions commerciales; le marché annuel était si important que le nom de Pylaea delphique devint synonyme de foire. Pour accéder à l'oracle, on construisit pour les chars une voie sacrée de la largeur de cinq pieds quatre pouces, qui servit de modèle pour tout le réseau des routes grecques qui furent construites sur le même modèle. Les dieux étant les plus riches propriétaires du pays, leurs prêtres, en possession des capitaux les plus gros, les firent valoir. Delphes reçut des rois d'Asie Mineure les premiers lingots d'or de l'Hellade. Les revenus du domaine, les amendes, le prix des consultations, les offrandes des fidèles enrichissent le sanctuaire. Ils donnent lieu à une administration financière, grâce à laquelle les prêtres accroissent la richesse du dieu. C'est dans le trésor de celui-ci que les Etats et les particuliers déposent leurs actes et titres les plus précieux, leur argent. L'oracle est en relations avec toutes les régions de la Grèce. Il devient un établissement financier qui joue le rôle de nos banques publiques. Ces relations d'affaires achèvent de renseigner la corporation sacerdotale sur les pays les plus éloignés. Elle fut donc en mesure de diriger les entreprises de ses fidèles, de tracer leur voie aux explorateurs et aux émigrants, d'avoir la haute main sur l'oeuvre de colonisation.

    Concluons par un ingénieux parallèle qu'a tracé Ernest Havet :

    « On a justement comparé l'autorité de Delphes à celle de la papauté. Delphes décidait souverainement les questions religieuses; elle faisait des dieux comme Rome faisait des saints; elle réglait tout ce qui regarde le culte. Mais elle savait et elle disait le dernier mot sur les choses humaines aussi bien que sur les divines. Elle était consultée même par les barbares. On ne pouvait douter que sa parole fût infaillible, puisque c'était celle d'Apollon; son « mantéon », d'ailleurs, réunissait les conditions sans lesquelles il n'y a pas d'autorité véritable : il était libre et indépendant. Les trésors, placés sous la sauvegarde de la Grèce, se grossissaient de la dîme du butin fait dans la guerre, de celle des confiscations et des amendes, des présents que les pèlerins apportaient sans cesse. On maintenait religieusement l'autonomie de son territoire et ce que nous appellerions aujourd'hui son pouvoir temporel. »
    Malheureusement, il advint comme d'habitude que le temporel corrompit le spirituel. L'or des barbares diminua le patriotisme du clergé delphique; sa conduite ne parut pas, dans les grandes crises de l'histoire grecque, d'un désintéressement irréprochable. On accusa, non sans motifs, l'oracle d'être au plus offrant. L'exploitation des pèlerins par la population peu recommandable qui encombrait les approches du temple fut reprochée au sacerdoce lui-même et non sans justice. Du jour où sa véracité fut suspectée, la décadence de l'oracle commença.
    Au VIe siècle, cette décadence s'annonce par les progrès des Athéniens, bien moins dévoués à la pythie que ne l'étaient les peuples d'origine dorienne. Le clergé delphique s'immisça dans leurs affaires intérieures et soutint la puissante famille des Alcméonides. Aussi Pisistrate et ses fils se conduisirent de manière à lui être désagréable. Ils réorganisèrent le culte de Délos et lui rendirent son importance, l'érigeant en sanctuaire ionien rival de Delphes; ils favorisèrent aussi à Athènes le culte d'Athéna, rivale d'Apollon. L'oracle eut le dessus dans cette lutte, puisque les Spartiates, à son instigation, renversèrent les Pisistratides; mais il en souffrit; les Spartiates trouvèrent excessif d'être les instruments d'intrigues compliquées et sans rapport avec leurs intérêts. Ils en furent surtout choqués lorsque l'oracle, corrompu par Cléomène, fit déposer le roi Démarate comme bâtard; la supercherie fut découverte, la pythie destituée. L'attitude de l'oracle, au moment des guerres médiques, fut déplorable. Il ne parle que pour décourager la résistance; il craignait la défaite et le pillage.

    Il prophétisa la destruction d'Athènes, interdit aux Argiens, aux Crétois, aux Corcyréens, de rallier l'armée nationale; après les Thermopyles, il engagea les Lacédémoniens à traiter. Il réussit, grâce à cette attitude équivoque à échapper au pillage. Après la victoire, les prémices du butin furent offertes à Delphes et les diverses cités rivalisèrent de magnificence dans leurs offrandes; Hérodote, circonvenu par les prêtres, avait de son histoire une véritable apologie en leur honneur. Cette bienveillance n'était déjà plus générale et contraste avec la dédaigneuse indifférence de Thucydide.

    La démocratie athénienne et surtout son chef Périclès tendirent à séculariser entièrement la politique. Périclès fit la guerre à l'oracle. En 448 eut lieu une guerre sacrée; les Phocidiens avaient la prétention de contrôler l'administration du temple qui était situé en Phocide. Les Delphiens appelèrent les Lacédémoniens, qui chassèrent les Phocidiens; ceux-ci recoururent à Athènes et une armée commandée par Périclès vint les remettre en possession; les Athéniens se firent donner par l'oracle un droit de « promantie » pareil à celui des Lacédémoniens. Dans la guerre du Péloponnèse, le sacerdoce de Delphes prit nettement parti pour Sparte; ses ressources furent mises à la disposition des alliés et les prédictions menaçantes pour Athènes multipliées. En revanche, le culte de Délos brillait du plus vif éclat. Lors de la trêve de Nicias, le protectorat des Phocidiens fut aboli par l'article suivant de la convention En ce qui concerne l'enceinte et le temple d'Apollon à Delphes, ainsi que les habitants de Delphes, ils seront indépendants, affranchis de tout tribut et de toute juridiction étrangère, eux et leur territoire. Lysandre enrichit la temple des dépouilles des Athéniens vaincus. Celles des Eléens, coupables d'avoir refusé de laisser les Spartiates demander au dieu d'Olympie sa protection pour une guerre entre Hellènes, furent également acceptées par l'oracle de Delphes, qui reniait ainsi son caractère panhellénique. Le châtiment vint au IVe siècle, lorsque les Spartiates, que le besoin d'argent, non moins que la dévotion, retenait au service de Delphes, furent déchus de leur hégémonie. Les Béotiens, voisins de l'oracle, l'aimaient peu.

    La réorganisation de l'Arcadie et de la Messénie fut dirigée par Epaminondas avec le concours d'oracles de Bakis et de devins libres. Jason de Thessalie projeta de s'emparer de Delphes, dont il mit utilisé les trésors à son profit. L'oracle finit par se soumettre au plus fort. Epaminondas réorganisa l'amphictionie d'où il exclut les Péloponnésiens; les Spartiates furent condamnés pour sacrilège à 500, puis à 1000 talents d'amende; ils étaient excommuniés par leurs anciens protégés; la dîme du butin fait en Laconie fut offert au dieu qui l'accepta. Cette versatilité porta malheur à l'oracle de Delphes. La vieille querelle avec les Phocidiens se ralluma; les Thébains accusèrent ceux-ci devant le conseil des Amphictyons d'avoir labouré des champs consacrés au dieu. Condamnés à une amende, les Phocidiens prirent les armes. Ainsi s'engagea la grande guerre sacrée. Les Phocidiens avaient contre eux Thébains et Thessaliens, mais pour eux les sympathies des Spartiates, maintenant ennemis de Delphes et des Athéniens. Leurs chefs, Philomélos et Onomarchos, s'emparèrent du temple; les Thrakides périrent dans la lutte. Philomélos mit la main sur les trésors de l'oracle, se fortifia dans le temple et recruta des mercenaires; il défit deux fois les Locriens. Le conseil amphictionique se réunit aux Thermopyles et proclama la guerre sainte contre les Phocidiens. Philomélos fit un emprunt au trésor sacré pour soutenir la lutte. Il périt bientôt. Mais Onomarchos et son frère Phayllos continuèrent la résistance; l'or et l'argent des ex-votos furent monnayés; le fer et le bronze servirent à fabriquer des armes. Allié du tyran de Phères, Lycophon, Onomarchos pilla la Béotie, défit le roi de Macédoine, Philippe (353). Ce dernier revint à la charge; Onomarchos fut tué; trois mille prisonniers. furent jetés à la mer comme sacrilèges. Les Athéniens occupèrent les Thermopyles (352). La guerre continua, mais l'or delphique finit par s'épuiser. Phaloecos, fils d'Onomarchos, finit par livrer les Thermopyles à Philippe et à se retirer avec ses mercenaires. Le roi de Macédoine réorganisa alors le conseil amphictionique en excluant les Phocidiens, dont il prit la place, et les Spartiates; les vingt-deux villes phocidiennes furent démolies; les habitants, dispersés dans des hameaux, devinrent tributaires de l'oracle (346). Celui-ci ne se releva jamais du coup qui lui avait été porté. Il a perdu son autonomie. La pythie philippise. Une querelle engagée à Delphes provoqua le dernier conflit qui se dénoua à Chéronée. Les Athéniens furent menacés d'une amende de 50 talents pour avoir consacré dans le temple non purifié des boucliers d'or en l'honneur de la victoire de Platées; leur député Eschine accusa à son tour les Amphisséens d'avoir labouré les champs sacrés. Ceux-ci repoussèrent par la force les Amphictions et les Delphiens qui venaient constater le délit, et une nouvelle guerre sacrée fut déclarée (339). Philippe châtia les Amphisséens, puis détruisit l'indépendance hellénique.

    Sous la domination macédonienne, l'oracle perd de plus en plus. La vie politique s'éteint en Grèce et les consultations se font rares. L'autocratie sacerdotale, décimée par la terrible guerre sacrée de 355, était déchue. Au IIe siècle av. J.-C., il n'y a plus que deux prêtres d'Apollon. Les statues, les ex-votos furent replacés dans le temple, mais non les trésors qui en avaient fait la grande banque de la Grèce. Les rois n'ont pas grande déférence pour ce clergé qu'ils sentent servile. Alexandre traîne la pythie au temple un jour néfaste. L'oracle n'a plus de rôle politique. Ses seuls clients sont les rois de Macédoine, pauvres et brutaux. La fondation du royaume de Pergame lui profita un peu. Les Etoliens énergiques et sauvages s'emparent du Parnasse (290). En 279, Delphes ne fut sauvée que parmiracle de l'invasion des Gaulois, qui pourraient bien avoir pillé le temple. Delphes accueillit avec plaisir les Romains qui, depuis les Tarquins, étaient en relations avec elle et chez qui les Livres sibyllins perpétuaient l'influence apollinienne. Après la ruine de la Macédoine, les privilèges de la ville furent rétablis. Elle était désormais incapable de se défendre contre les incursions des bandes qui parcouraient la presqu'île; les Gaulois en 114, les Thraces à deux reprises, la saccagèrent. Sylla se fit expédier tous les trésors du dieu qu'il remboursa en lui consacrant la moitié du territoire des Thébains, créance illusoire. Le coup suprême fut porté à l'oracle par Néron. Il avait commencé par lui faire des cadeaux; mais, irrité par des prophéties qu'on fit circuler, il dépouilla le temple de son domaine, le profana en y versant le sang, en jetant des cadavres dans l'antre sacré, et emporta cinq cents statues pour accroître ses collections. Après ce sacrilège, l'oracle se tut; il donna encore quelques rares consultations, mais son fonctionnement régulier cessa. Il ne reprit qu'au temps de Trajan ou d'Hadrien. C'est alors que Plutarque le visita. II n'avait plus qu'une clientèle minime et médiocre qui le consultait sur ses affaires privées, opportunité d'un voyage, d'un mariage, d'un prêt, etc. Sous le règne de Constantin, on déménagea la plupart des oeuvres d'art pour orner la capitale nouvelle. On prétend même que les prêtres découragés refusèrent de répondre à Julien. L'oracle disparut et bientôt la ville même de Delphes ne fut plus qu'un souvenir jusqu'au jour où la déterrera la curiosité des archéologues. (GE).

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    Message  Guig Mer 17 Nov - 21:16

    Oracle grec




    Les oracles constituent un aspect fondamental de la religion et de la culture grecques. L'oracle est la réponse donnée par un dieu que l'on a consulté à une question personnelle, question qui porte généralement sur l'avenir. De tels oracles ne peuvent être rendus que par certains dieux, dans des lieux précis, sur des sujets déterminés et dans le respect de rites rigoureux : la prise d'oracle s'apparente à un culte. De plus, interpréter les réponses du dieu, parce que ce dernier s'exprime de diverses manières, peut nécessiter un apprentissage. Aussi, l'oracle nécessite souvent une interprétation, voire une médiation.
    Par extension, le terme d'oracle désigne aussi le dieu consulté, l'intermédiaire humain qui transmet la réponse du dieu ou encore le lieu sacré où la réponse est donnée. La langue grecque distingue ces différents sens : entre autres termes, la réponse divine peut être désignée par χρησμός khrêsmós, proprement « le fait d'informer ». On peut aussi dire φάτις phátis, « le fait de parler ». L'interprète de la réponse divine est souvent désigné par προφήτης prophêtês, « qui parle à la place [du dieu] », ou encore μάντις mántis. Enfin, le lieu de l'oracle est le χρηστήριον khrêstếrion.

    La mantique, c'est-à-dire le domaine de la divination, n'est, dans le monde grec antique, constituée que par les sciences oraculaires. Les devins célèbres, comme Tirésias, sont considérés comme des personnages mythologiques : la divination, en Grèce, n'est pas l'affaire de mortels inspirés mais de personnes qui respectent des rites déterminés, bien que la tradition ait pu mettre en avant une telle inspiration ou, au sens propre, un tel ἐνθουσιασμός ([enthousiasmós] « enthousiasme »), c'est-à-dire le « fait d'avoir le dieu en soi ».

    Pour des raisons de lisibilité, les informations concernant la religion grecque sont divisées en quatre parties :
    1. Les sources utilisées pour la connaissance de la religion grecque ;
    2. Les notions fondamentales et le vocabulaire religieux ;
    3. Les aspects du culte ;
    4. Les oracles.





    Table des matières [voircacher]
    1. Les dieux-devins
    1.1. Zeus
    1.2. Autres dieux


    2. Apollon Pythien
    2.1. Vitalité de l'oracle de Delphes
    2.2. Organisation religieuse
    2.3. Rôle politique de l'oracle de Delphes
    2.4. Rôle spirituel et intellectuel de l'oracle de Delphes


    3. Articles liés1. Les dieux-devins
    La faculté de divination, ou μαντεία manteía, est une capacité purement divine.

    Pour comprendre la mantique grecque, il faut savoir que le destin, personnifié par les trois Moires (Μοῖραι mõirai, (« celles qui donnent [le destin] en partage »), est une force indépendante des dieux : ces derniers lui sont soumis et ne peuvent l'infléchir. Tout au plus peuvent-ils tenter d'en retarder le déroulement et, surtout, l'entrapercevoir et en faire part, de manière voilée, aux mortels.

    Ce pouvoir divin de divination semble, dans les premiers temps de la mantique, être fortement lié à la terre et aux forces chthoniennes (aux forces des enfers) : de là vient l'idée des oracles rendus par incubation, c'est-à-dire transmis aux mortels par le vecteur des songes, généralement après une nuit passée à même le sol.

    1.1. Zeus
    Le premier dieu-devin est Zeus : ses oracles sont rendus dans de nombreux sanctuaires, dont le plus ancien est celui de Dodone, en Épire.

    Le sanctuaire oraculaire de Dodone, d'ailleurs cité chez Homère, a connu un déclin au IVe siècle avant notre ère. Les oracles de Zeus y étaient transmis, entre autres, aux prêtres Selles par incubation. Ces derniers, pour rester en contact avec le dieu sous un aspect chthonien (ce qui montre l'ancienneté de l'oracle), devaient dormir à même le sol, marcher pieds nus et ne pas se laver les pieds.

    Plus tard, l'aspect ouranien du dieu prévalut : c'est par le bruit du vent dans les feuilles des chênes sacrés du bosquet de Dodone que ce dernier s'exprima. L'interprétation put aussi être effectuée à partir du vol des oiseaux par deux prêtresses, surnommées les Colombes : celles-ci pratiquaient peut-être ainsi la prise d'auspices. Certaines des questions posées au dieu ont été retrouvées sous la forme d'inscriptions tardives sur des lamelles de bronze.

    Zeus-devin était aussi consulté à Olympie, où il s'adressait aux prêtres Iamides par l'intermédiaire des flammes sacrificielles. Ces prêtres étaient également haruspices : ils pouvaient lire la réponse du dieu dans les entrailles prélevées sur la victime du sacrifice.

    À l'époque classique, enfin, Zeus oraculaire fut surtout présent en Égypte, où il fut identifié à Amon.

    1.2. Autres dieux
    Aphrodite était consultée à Paphos, ville de l'île de Chypre, où elle s'exprimait à travers les entrailles et le foie des victimes sacrificielles ; comme pour Zeus à Olympie, cette méthode oraculaire s'apparente à l'haruspicie.

    Athéna, quant à elle, adressait ses réponses à travers la disposition d'un jeu de galets et d'osselets.

    Asclépios, ou Esculape, et Amphiaraos s'exprimaient par incubation (voir plus haut) et pouvaient prodiguer des conseils thérapeutiques aux malades sous la forme de rêves : ces derniers devaient passer au moins une nuit dans un sanctuaire dédié à ces dieux : principalement Épidaure et Athènes pour Asclépios ; Oropos (au nord d'Athènes) et Thèbes pour Amphiaraos. L'interprétation devait être faite par le consultant lui-même.

    2. Apollon Pythien
    Apollon est devenu l'archétype du dieu devin : on le consultait par oracle surtout à Delphes, mais aussi à Dèlos, Patara, ou encore à Claros.

    Les oracles que le dieu rendait à Delphes sont encore célèbres et l'importance de ce sanctuaire oraculaire a permis d'en connaître les rites, ainsi que d'apprendre certains détails importants de la mantique grecque.

    2.1. Vitalité de l'oracle de Delphes
    L'oracle de Delphes est resté très vivant et consulté jusqu'à la période chrétienne ; les chrétiens, cependant, en le caricaturant, en donnant de la pythie – l'interprète oraculaire d'Apollon – la fausse image d'une femme hystérique et droguée, et en transmettant des textes erronés, ont participé grandement à son abandon définitif après, il est vrai, un lent déclin qui avait commencé dès le IVe siècle avant notre ère.

    Parmi les témoignages les plus complets concernant l'oracle de Delphes, il faut citer celui de Plutarque (v. 46 – v. 120 de notre ère) : ce dernier a longtemps assumé la charge de prêtre du temple d'Apollon, chargé du sanctuaire oraculaire. Nous savons par ailleurs, grâce aux fouilles menées sur le site, que le sanctuaire de Delphes a été l'un des plus fréquentés et des plus riches de la Grèce antique.

    Pour plus de détails sur le sanctuaire lui-même, consulter l'article qui lui est consacré.

    2.2. Organisation religieuse
    La prophétesse, au sens grec, c'est-à-dire celle qui parle à la place [du dieu], est nommée la Pythie (Πυθία ἱέρεια puthía hiéreia, « prétresse pythienne »). Elle était en théorie choisie parmi les femmes vierges de la région et de préférence inculte.

    Son nom (à l'origine un adjectif, mais Πυθία (puthía) fut souvent utilisé seul) vient d'une épithète / d'un attribut d'Apollon : ce dernier était dit Pythien à Delphes parce qu'il y avait terrassé le serpent mythique Python ; Delphes, d'ailleurs, fut souvent nommée Πυθώ puthố (voir l'article Apollon pour plus de détails).

    Selon Plutarque, la Pythie était souvent âgée : ce dernier nous apprend qu'elle pouvait avoir une cinquantaine d'années, ce qui, pour l'époque, était un âge avancé.

    Elle s'exprimait également en vers (selon Strabon) ou du moins, elle l'avait fait pendant longtemps : Plutarque, encore, fait remarquer qu'à son époque elle parlait en prose, sans cependant en donner l'explication. Il nous apprend également que les propos confus de la Pythie devaient être interprétés par un collège de deux prêtres, assistés par cinq ministres du culte. Chose exceptionnelle, ces charges étaient attribuées à vie.

    La marche à suivre pour consulter l'oracle était la suivante :

    le consultant (qui ne pouvait être une femme) s'acquittait d'une taxe versée à la confédération de cités qui administrait le site via une association ; les consultations pouvaient être demandées individuellement ou collectivement, par exemple au nom d'une cité. Le paiement d'une surtaxe ou, en nature, des services rendus à Delphes, permettaient alors d'acquérir le droit de promancie, c'est-à-dire le droit de consulter avant les autres et ainsi de passer outre la liste d'attente. Cette dernière pouvait être très longue. Les consultations avaient lieu à date fixe : d'abord une fois par an, le septième jour du mois grec correspondant à février-mars (jour d'Apollon), puis le septième jour de chaque mois à l'époque où le sanctuaire connaissait son apogée ; Plutarque nous apprend encore que jusqu'à cinq Pythies avaient pu se partager la tâche de rendre l'oracle, tandis qu'à son époque une seule existait.
    le consultant offrait un sacrifice sanglant au dieu, sacrifice qui était conduit par les deux prêtres et leurs assistants ; préalablement, la victime était aspergée d'eau froide et, si elle ne tremblait pas, la prise d'oracle était annulée (au risque, sinon, de tuer la Pythie : elle ne pouvait aller contre ce signe du dieu qui donnait ou non son accord) ;
    on menait le consultant dont le tour était venu dans l'adyton du temple d'Apollon ;
    La Pythie, qui s'était purifiée, avait bu l'eau d'une source de Delphes et mâchait des feuilles de laurier ; elle était installée sur un trépied.
    le consultant posait sa question à la Pythie, question que les prêtres avaient souvent remise en forme (afin qu'elle offrît la possibilité d'une réponse alternative) ;
    la Pythie, enfin, rendait l'oracle du dieu qui s'exprimait à travers elle ; sa réponse devait être éclaircie par un des prêtres d'Apollon. D'après les témoignages, dont ceux de Plutarque, on peut penser que la Pythie n'était pas visible, et que le consultant n'entendait que sa voix : aucune certitude, toutefois, n'existe à ce sujet.
    La Pythie était-elle en état d'enthousiasme, c'est-à-dire d'inspiration divine ? La légende rapporte, dès l'antiquité, qu'une fissure sous le trépied qui soutenait la prophétesse exhalait des effluves magiques dans le temple et que ces exhalaisons étaient responsables de l'état second connu par la Pythie lors de l'oracle.

    Selon Pausanias (X, 5, 7), qui ne fait alors que répéter la légende, le lieu mantique aurait même été découvert par des bergers « victimes » de ces effluves ; Diodore de Sicile reprend cette tradition et affirme que les exhalaisons auraient même poussé nombre de gens soudain pris d'un délire prophétique au suicide, avant que l'on destine la seule Pythie au rôle dangereux de les respirer.

    Il convenait donc que la Pythie, pour qu'elle puisse recevoir l'inspiration divine sans en souffrir, fût à la fois pure, vierge, et menât une vie saine. L'esprit de cette dernière devait être disponible, calme et serein, afin que la possession par le dieu ne soit pas rejetée, au risque de la mener à sa mort.

    On l'a dit, les chrétiens ont tourné en dérision cette prêtresse et par là le culte en décrivant la Pythie comme une folle écumant de bave, enivrée de vapeurs de souffre, possédée physiquement par le Malin qui s'introduisait depuis les profondeurs de la terre dans son vagin. De tels propos se trouvent, par exemple, chez Origène ou chez Jean Chrysostome. Quoi qu'il en soit, cette vision tardive ne coïncide absolument pas avec ce que les Grecs ont rapporté de leur oracle.

    Enfin, ce qui contredit la tradition antique probablement elle-même d'origine delphique, aucune fissure n'a été découverte sous le temple d'Apollon lors des fouilles menées par l'École française d'Athènes à Delphes. La nature du sol schisteux n'y laisse d'ailleurs aucune chance à d'éventuelles exhalaisons naturelles.

    2.3. Rôle politique de l'oracle de Delphes
    Outre un rôle religieux majeur dans le monde antique – l'oracle d'Apollon, en effet, n'était pas exclusivement consulté par les Grecs – les oracles de la Pythie purent avoir, à l'occasion, un rôle important à jouer en politique, soit en intervenant dans les relations entre les cités de la Grèce, soit en intervenant dans les relations entre le monde grec et le monde barbare. Trois oracles sont révêlateurs en la matière : ils peuvent traduire, en effet, au-delà de l'opinion que le dieu Apollon était sensé avoir, quelle était la position du sanctuaire de Delphes à différentes périodes :

    Lors des guerres médiques (qui opposèrent les Grecs aux Perses), Athènes consulta l'oracle, en 490 avant notre ère, afin de demander s'il était bon que Sparte l'aidât. L'oracle rendit alors une réponse négative ; ce fut pourtant justement l'intervention du Spartiate Léonidas aux Thermopyles, en 480, qui permit aux Athéniens de gagner du temps pour remporter la victoire de Salamine. Cette victoire est néanmoins attribuée à un oracle de la Pythie, celle-ci ayant conseillé de bâtir un mur de bois, ce qui, symboliquement, fut fait en massant la flotte athénienne dans le goulet de Salamine. Toujours est-il qu'après la réponse sur Sparte, les Grecs accusèrent la Pythie de mêdiser (μηδίζειν ; mêdízdein), de « parler en faveur des Mèdes ».

    Un deuxième oracle emblématique eut lieu durant les guerres du Péloponnèse qui opposèrent Athènes à Sparte ; l'oracle donna alors clairement raison aux Spartiates. Les Athéniens accusèrent alors la Pythie de lacôniser (λακωνίζειν lakônízdein), de « parler en faveur de Lacédémone », autre nom pour Sparte.

    Enfin, lors des conquêtes de Philippe II de Macédoine, l'oracle, résolûment du côté du « barbare », fut accusé par les Athéniens de philippiser (φιλιππίζειν philippízdein).

    Au final, il apparaît que l'oracle se montra surtout méfiant vis-à-vis des Athéniens. En fait, il subissait bien sûr l'influence des prêtres, issus de l'aristocratie delphique. Il est donc probable que ceux-ci aient été peu enclins à soutenir la puissante démocratie athénienne. De même, deux de ces épisodes démontrent que l'oracle – lorsque le danger était présent – fut plus facilement du côté du plus fort que de celui des Grecs.

    2.4. Rôle spirituel et intellectuel de l'oracle de Delphes
    L'oracle de Delphes appuya la fondation de colonies par des Grecs : cela s'explique par le rôle d'Apollon Pythien comme patron des entreprises coloniales. L'appropriation du sanctuaire de Delphes par Apollon est, en effet, dans la poésie homérique un acte fondateur à rapprocher de celui des colons grecs en terre barbare : Apollon conquiert par les armes le site préexistant du culte chthonien de la Terre ; il est aussi, sous la forme d'un dauphin, le chef de marins crétois qui établissent son sanctuaire sur le site de Delphes. Le dieu peut ainsi lui-même être identifié au chef d'une entreprise coloniale.

    Un exemple de ce rôle de l'oracle est présent dans la légende de la fondation de la colonie de Cyrène, en Libye : un certain Bathos était affligé d'un bégaiement. L'oracle de Delphes lui conseilla de fonder une cité à Cyrène pour sa guérison ; ce faisant, Bathos rencontra un lion et la peur causée par cette rencontre fortuite le guérit définitivement de son affliction. Il existe un nombre important d'exemples de ce type.

    Delphes, d'autre part, joua un rôle économique important dans l'Antiquité grecque : ville très fréquentée, l'argent y circulait (celui des taxes de consultation, des nombreux trésors offerts par les cités que l'oracle avait « favorisées », des offrandes, des achats de victimes sacrificielles que seuls les marchands de la ville avaient le droit vendre, etc.). Apparurent, pour gérer le flux monétaire créé par les consultations oraculaires, des changeurs et des prêteurs. C'est d'ailleurs à Delphes, au VIe siècle avant notre ère, que les premières « banques » firent leur apparition.

    Apollon n'était pas, en outre, le seul dieu résidant à Delphes. La notoriété du sanctuaire contribua à l'essor du culte de Dionysos : ce dernier était réputé y passer trois mois d'hiver, lorsqu'Apollon se rendait en hyperborée. C'est probablement à Delphes que Dionysos gagna de l'importance pour devenir le double opposé indissociable d'Apollon. Athéna pronaia – celle qui garde ou celle qui précède – était aussi honorée dans un second temple situé à l'entrée du sanctuaire : la coexistence de ces cultes faisaient dire aux anciens que la présence de l'oracle était un gage de respect mutuel.

    Enfin, la ville de Delphes baignait dans un climat de piété et d'effervescence intellectuelle. On s'y dépouillait de ses masques sociaux, à l'image d'Apollon qui, fondant la cité, dut se purifier du meurtre de Python. La philosophie y était pratiquée et encouragée, et c'est un oracle de Delphes qui aurait poussé Socrate à enseigner, après qu'un de ses disciples y avait appris que son maître était le plus sage des hommes. Plusieurs devises à caractère philosophique ornaient des bandelettes du temple d'Apollon : les plus célèbres sont « rien de trop » (μηδὲν ἄγαν mêdén ágan), inculquant la mesure et le rejet des excès, « connais-toi toi-même » (γνῶθι σεαυτόν gnỗthi seautón), enseignant l'importance de l'autonomie dans la recherche de la vérité et celle de l'introspection (Socrate reprit cette formule à son compte). Un très étrange epsilon (« Ε ») ornait le fronton du temple d'Apollon : les Grecs se sont longuement interrogés sur sa signification. Selon un philosophe maître de Plutarque, celui-ci pouvait être une manière de noter le mot εἶ eĩ, « tu es », sous-entendu « toi aussi une partie du divin ». Quoi qu'il en soit, la présence de l'oracle a fait de Delphes le lieu par excellence de la révélation à soi.



    3. Articles liés
    Sources utilisées pour la connaissance de la religion grecque ;
    notions fondamentales ;
    aspects du culte ;
    Grèce antique.

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    Message  Guig Mer 17 Nov - 21:21

    Oracles chaldaïques
    rechercher Les Oracles chaldaïques (Χαλδαϊκά λογία) ou Oracles chaldéens sont un recueil d'oracles de théurgie (magie supérieure), publié en grec, vers 170 (sous l'empereur romain Marc Aurèle), par Julien le Théurge, le premier à être nommé « théurge », et fils de Julien le Chaldéen. Il ne reste que des fragments et des témoignages. "Chaldéen" ou "chaldaïque" veut dire magique, occulte.[1]

    Le livre, comme les ouvrages prophétiques grecs, est écrit en hexamètres dactyliques. Il se présente comme un recueil de révélations oraculaires.

    Selon Psellos, le scénario serait le suivant : Julien père (Julien le Chaldéen) essaie d'amener son fils (Julien fils, Julien le Théurge) à atteindre l'âme de Platon, qu'il interroge. Selon une hypothèse plus audacieuse encore, venant de Henri Dominique Saffrey, il s'agirait de médiumnisme et de platonisme : les Oracles chaldaïques seraient une transposition du Timée de Platon, et les oracles seraient les réponses faites par l'âme de Platon à l'âme de Julien le Théurge conduit par son père Julien le Chaldéen[2].

    Le livre a été commenté par Porphyre de Tyr, Proclos, Psellos, Gemiste Pléthon, Damascios, Michel Italicos.

    Philosophie
    Franz Cumont[3] résume ainsi la doctrine philosophique : « À la suite de Platon, les théurges chaldéens opposaient nettement le monde des formes intelligibles des Idées au monde sensible des apparences. Ils avaient donc de l'univers une conception dualiste. Au sommet de leur panthéon, ils plaçaient l'Intellect, qu'ils appelaient aussi “le Père”. Ce dieu transcendant, qui s'enveloppe de silence, est déclaré impénétrable, et cependant il est parfois représenté comme un Feu immatériel, dont tout est issu. Au-dessous de lui s'étagent les triades du monde intelligible, puis les dieux qui siègent au delà des sphères célestes ou qui y président. L'âme humaine, d'essence divine, étincelle du Feu originel, descendant par un acte de volonté les degrés de l'échelle des êtres, est venue s'enfermer dans la geôle d'un corps. Quand elle sera dépouillée de toutes les enveloppes matérielles dont elle s'était chargée, l'âme bienheureuse sera accueillie dans le sein paternel du Dieu suprême. »

    Le monde a donc trois étages : le monde du Feu (le monde intelligible), le monde éthéré (les corps célestes), enfin le monde matériel sous la Lune (les quatre Éléments : Terre, Eau, Air, Feu). La triade céleste comprend le Père (Premier Dieu), la Puissance (Dieu fils) et l'Intellect (Démiurge). « En tout monde resplendit une triade, qu'une monade commande » (fragment 27).

    Il semble que la philosophie des Oracles chaldaïques dépende de la philosophie de Numénius d'Apamée, un penseur du moyen-platonisme légèrement antérieur (vers 155), mais certains savants estiment que c'est Numénius qui fut influencé par ces Oracles. « La priorité des Oracles a pour elle H. Lewy et Eric Robertson Dodds ; celle de Numénius d'Apamée, A.-J. Festugière et J. H. Waszink » (Édouard des Places), auxquels on peut ajouter Charles H. Kahn. En tout cas, on voit de nombreuses triades, caractéristiques du moyen platonisme. Chez Numénius d'Apamée il y a trois dieux (Un, Démiurge, Troisième Un qui est l'Âme du monde ou le cosmos), comme dans les Oracles.

    Théurgie La théurgie est une action de type magique où l'officiant s'efforce d'entrer en contact avec les dieux, pour tirer des connaissances, pour obtenir une opération miraculeuse, ou pour atteindre à un genre de vie homologue à celui des dieux. Deux méthodes sont possibles : la contemplative et l'opérative. La théurgie contemplative passe par l'élévation de l'intellect, tandis que la théurgie opérative passe par des rites et des objets sacrés.

    Deux techniques dominent : l'animation de statues, l'évocation des dieux grâce à des médiums en transe.[4]


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